les dossiers de l’ afis44
DOSSIER : GENETIQUE
sujet
: le clonage humain
rubrique : les positions rencontrées au sein de l’AFIS
document : actualité de l’ « appel des 31 » (JC. PECKER
25 août 2003)
Jean-Claude PECKER est astrophysicien, professeur honoraire
d’astrophysique théorique au Collège de France, membre de l’académie des
sciences. Il est l’auteur de
très nombreux livres, dont nous nous contenterons de citer
Lauréat de l’académie
internationale d’humanisme, il est, tout comme Simone VEIL, l’un des trente
et un lauréats de cette académie signataires de l’appel de 1997 en défense du
clonage et de l’intégrité de la recherche scientifique. Jean-Claude PECKER a
été président de l’association française pour l’information scientifique et
en est membre des comités scientifique et de parrainage. |
AVERTISSEMENT : à l’issue d’une discussion amicale faisant le
point sur l’actualité de la déclaration en défense du clonage et de l’intégrité
de la recherche scientifique de 1997 (à l’initiative du philosophe Paul KURTZ
et qui a regroupé 31 lauréats de l’académie internationale d’humanisme, dont
Jean-Claude PECKER et Simone VEIL pour la France, mais dont aussi Francis
CRICK, prix Nobel pour la découverte de l’ADN), et notamment du fait des
développements récents (agitation médiatique et peut-être même en laboratoire
de la secte Raël, évolution du débat d’éthique,
etc.), Jean-Claude PECKER m’a fait parvenir le 25 août 2003 un court message
qu’il m’a autorisé à rendre public. Bien sûr il ne s’agit pas d’une
« déclaration » ou d’un « appel » puisqu’il s’agit d’un
jalon dans un débat, le texte lui-même reflétant, par les réponses apportées,
certaines des questions abordées dans l’entretien. La phrase mise en exergue
par une coloration rouge dans le message été signalée en caractères gras par
JCP lui-même dans le corps de son message électronique. Le titre est bien sûr
« de la rédaction ». [MN]
Je
ne souhaite en rien modifier l’opinion exprimée en 1997
« Aujourd'hui, à
la fin du mois d'août 2003, je ne souhaite en rien modifier l'opinion
exprimée par le texte que j'ai co-signé en
1997, et qui a été diffusé par le site <secularhumanism.org> et publié en
anglais (Free Inquiry Magazine, volume 17 n°3). Je
maintiens que la raison est l'outil le plus puissant dont dispose l’humanité.
Je maintiens que la recherche scientifique doit se poursuivre librement, y
compris sur le clonage, - comme sur l'énergie nucléaire, la pharmacopée,
ou les perturbations climatiques....
Ce sur quoi je voudrais être clair (et ce qui m'éloignera de la position
des raéliens, et sans doute aussi de certaines attitudes répandues aux
USA), c'est que je suis résolument opposé à toute exploitation politique ou
commerciale de la recherche sur des sujets pouvant prêter à controverse. Celle-ci doit être menée dans les
laboratoires publics de recherche, et financée par le budget public de la
recherche. Et en
cela, je rejoins une position déjà ancienne prise par de nombreux
gouvernements, dont le nôtre, interdisant la commercialisation des
éléments du génome humain (et la prise de brevets les concernant). La recherche
sur le clonage ne doit en aucun cas être l'objet de transactions
commerciales, ni être financée par des personnes ou des entreprises
privées.
Ceci dit, on m'a posé une question: quel sort
auront les éventuels enfants nés d'une opération de clonage? la
réponse est simple D'une part ils auront une mère porteuse qui les aura
désirés. D'autre part, l'adoption d'un enfant est une pratique courante, et le
plus souvent bénéfique pour l'enfant comme pour les parents adoptifs. Je ne
vois pas la différence.
Quant aux sentiments que pourrait avoir
un enfant "clone" issu de cellules d'un enfant décédé dans sa prime
enfance, je dirais qu'ils seront comparables à ceux des enfants dont un aîné
est mort-né, ou mort jeune; bien au contraire, des "puînés" devraient
alors éprouver le sentiment d'avoir été désirés plus encore par leurs
parents....
Quels sont donc ceux qui condamnent le
développement scientifique,- mais qui utilisent chaque jour leur ordinateur,
leur téléphone portable, ,leur grosse voiture, leur machine à laver la
vaisselle, que sais-je encore?...,ceux qui se soignent avec des antibiotiques,
qui bénéficient d'un rein artificiel?.. , tous ceux dont la
durée de vie et les conditions de vie ont été améliorées
régulièrement par les retombées de la recherche scientifique?
Ceux-là pourraient peut-être se préoccuper
des millions d'enfants errants sur les trottoirs de Manille, ou dans les
favelas de Rio, des millions d'enfants crevant de misère et de faim au Ruanda
ou ailleurs.... Les droits de l'Homme sont violés partout, de façon massive,
évidente, actuelle: c'est à leur sauvegarde que devrait se situer la priorité
de notre éthique...
Et, quoi qu'il en soit, la raison reste
notre plus grande richesse, - notre défense aussi contre les abus dont certains
individus ou certaines puissances sont, ici et là, coupables... »
Jean-Claude PECKER
afis, Science et pseudo-sciences, 14 rue de l'école polytechnique, 75005
PARIS.