afis

 

le bulletin de l'    information scientifique

du comité départemental 44 de l'association française pour l'information scientifique

PERIODIQUE A PERIODICITE VARIABLE                                                                                        N° 3 - JUILLET 2003

 

L'EDITO

 

Réussir le 8 septembre 2003 !

 

C’est dans à peine plus d’un mois que Bertrand JORDAN sera à Nantes à l’invitation de l’AFIS, de la Libre Pensée et de l’Union Rationaliste. Le thème générique de la génétique a tout ce qu’il faut pour enflammer l’imagination, cristalliser les inquiétudes et déchaîner les passions. Nous le voyons bien avec les questions autour du clonage mais plus encore peut-être avec la question des organismes génétiquement modifiés dans l’alimentation (ce mois-ci encore la filière « agrobiologique » des pays de la loire a demandé qu’aucun OGM ne soit produit dans notre région).

 

Les questions autour de la génétique ne sont pas toutes de nature scientifique ; les enjeux économiques ne sont jamais loin (d’autant plus qu’il est plus facile de gagner de l’argent avec les bonnes idées qu’avec les mauvaises) ; mais c’est également une évidence que les présupposés philosophiques et les peurs ancestrales sous-tendent souvent les questionnements et prennent d’autant plus facilement le dessus que le degré d’instruction et d’information scientifiques est bas.

 

Dans la rubrique « souvenirs, souvenirs » j’ai décidé de reproduire un extrait d’une publication du biologiste Ernest KAHANE, dans les années 50, en apostrophe à ceux qui à l’époque brandissaient l’étendard du « naturel » contre l’ « artificiel ». Bien sûr on ne parlait pas encore de « bio » ou d’ « OGM ». D’une façon générale, dans les brèves de ce bulletin, j’ai sélectionné des nouvelles récentes touchant, pour la plupart, les domaines biologiques ou génétiques de façon à donner un peu de matière préparatoire à la conférence que nous co-organisons avec la Libre pensée et l’Union rationaliste.

 

Le 8 septembre sera également l’occasion d’une initiative qui pourrait être porteuse d’avenir ; en effet nous avons contacté la FNAC de Nantes pour suggérer que Bertrand JORDAN soit au centre de l’une des rencontres que la FNAC organise régulièrement dans ses animations régionales. La FNAC de Nantes est intéressée par cette initiative et Bertrand JORDAN sera donc l’invité de la FNAC le lundi 8 septembre à 17h30. Dans un premier temps il débattra avec les auditeurs sur le mode question-réponse, étant convenu avec la FNAC que c’est moi, es qualité de coordinateur de l’AFIS au plan départemental, qui assurerai l’animation, puis, dans un deuxième temps, il dédicacera ses ouvrages. Nous avons conscience, tant la FNAC que nous-même, qu’une date plus tardive aurait été plus adaptée au regard des calendriers universitaires mais cette rencontre aura, pour la FNAC, valeur de test sur l’opportunité de renouveler.

 

Nous pourrions d’ores et déjà envisager de renouveler cette initiative le 28 novembre, date à laquelle Jean-Pierre KAHANE, académicien des sciences, ancien président de l’université d’Orsay et de la société française de mathématiques, actuel président de l’union rationaliste (et fils du biologiste Ernest KAHANE précédemment cité qui fut lui-même en son temps président de l’Union rationaliste) devrait venir pour un séminaire de mathématiques à l’école des Mines.

 

Mais avant cela, reste à réussir le 8 septembre, alors venez nombreux et faites venir, à la rencontre et à la conférence !

 

Michel NAUD, coordinateur du comité départemental, le 31 juillet 2003

 

lundi 8 septembre 2003 à 20h00 - Amphithéâtre du Muséum d’Histoire Naturelle - NANTES

les fantasmes en biologie :

du clonage aux perspectives d’amélioration génétique

conférence par Bertrand JORDAN, biologiste moléculaire, directeur de recherches émérite au CNRS

co-organisation par le comité départemental de Loire-Atlantique de l’Association française pour l’information scientifique,

par le groupe de Nantes de la Libre Pensée et par la section départementale de Loire-Atlantique de l’Union Rationaliste

 

lundi 8 septembre 2003 à 17h30 – deuxième étage de la FNAC - NANTES

Rencontre avec Bertrand JORDAN, animée par Michel NAUD, coordinateur du

comité départemental de Loire-Atlantique de l’Association française pour l’information scientifique, suivie d’une dédicace.


Les brèves …

 

un virus génétiquement modifié

( source Agence Science-Presse 14 mai 2003)

Un virus qui ne s'attaque qu'aux cellules cancéreuses.

C'est l'annonce qui a été faite début mai 2003. Mais elle est à des années-lumière d'une réalisation pratique.

Pour l'instant, tout ce qu'en savent les chercheurs, c'est qu'ils ont obtenu des résultats inattendus avec des souris.

Celles-ci souffraient d'une forme de cancer du cerveau. La thérapie a consisté à leur injecter un virus sur la composition duquel les chercheurs du Centre Anderson du cancer, à l'Université du Texas, sont restés assez discrets. Plus de la moitié des souris ont survécu plus de quatre mois, contre trois semaines pour celles qui n'ont reçu aucun traitement, selon les résultats, publiés dans la dernière édition du Journal of the American Cancer Institute.

L'avantage d'un tel traitement, s'il pouvait fonctionner, c'est qu'il pourrait s'attaquer spécifiquement aux cellules cancéreuses, sans endommager le reste –au contraire des traitements actuels que sont la radiothérapie et la chimiothérapie. Un virus, en effet, peut être littéralement "programmé" pour ne s'attaquer qu'à ce dont on veut bien qu'il s'attaque. Et une fois qu'il a dévoré toutes les cellules cancéreuses, il meurt, faute de nourriture. Toujours en théorie.

Des tests sur des humains pourraient démarrer dès la fin de l'année 2004, si les autorités médicales américaines donnent leur accord, après avoir décortiqué les résultats de cette recherche.

 

le café décaféiné qui pousse dans les arbres

(source Agence Science-Presse et Infossciences 1er juillet 2003) - Pour ceux qui l'ignorent, le café pousse dans les arbres, mais le café décaféiné, lui, est obtenu en usine. Ce n’est plus le cas au Japon, où des chercheurs viennent d'annoncer dans Nature être parvenus à faire pousser avec succès, depuis un an, des grains de café décaféiné. L'astuce consiste à obtenir un café modifié génétiquement de telle façon que ses grains soient à très faible teneur en caféine.

L’obtention actuelle du décaféiné est coûteuse et complexe. Il faut veiller constamment à un équilibre difficile entre la faible teneur en caféine et le goût, puisque le fait d'extraire la caféine des grains au moyen du dioxyde de carbone a souvent pour effet d'évacuer les arômes.

La génétique permet de ne cibler que les gènes de la caféine sans toucher à ceux des arômes. La biosynthèse de la caféine s'opère par trois méthylations successives d'une autre molécule, la xanthine. Ce processus s'effectue grâce à trois N-méthyltransférases : CaXMT1, CaMXMT1 et CaDXMT1. Les scientifiques japonais de l'Institut de science et technologie de Nara (Japon) ont transformé un plant de café (de type Coffea canephora) dans le but d'inactiver le gène codant pour la théobromine synthétase (CaMXMT1). Le résultat, encourageant, a été une diminution de 50 à 70% de la caféine dans les grains. La prochaine étape consistera maintenant à appliquer la technique sur des plantes de café de type Coffea arabica donnant le fameux café arabica qui représente 70% du marché mondial. Le "café décaféiné génétiquement" n'est obtenu pour l'instant qu'à titre expérimental, mais pourrait être produit à plus grande échelle d'ici trois ou quatre ans.

 

du boeuf génétiquement meilleur

 (source Agence Science-Presse) - Des chercheurs brésiliens vont tenter de rendre leur bœuf de meilleure qualité, en misant sur la génétique. Avec plus d'un million de dollars, le projet génome fonctionnel du bœuf a comme objectif, d'ici 18 mois, d'identifier 6000 gènes bovins. On espère ainsi améliorer l'efficacité de la reproduction, augmenter la résistance du boeuf à certaines maladies et accroître la qualité de sa chair.

Découvrir les secrets génétiques d'une bonne viande est un partenariat entre la Fondation de Amparo à Pesquisa do Estado de Sao Paulo (Fapesp) et la Central Bela Vista Genética Bovina, une des plus importantes entreprises de production de sperme du Brésil. Les recherches se concentreront sur la race nelore qui représente 80 % du cheptel brésilien. Elle est aussi plus adaptée aux conditions tropicales que les européennes.

Luiz Lehmann Coutinho, coordinateur du projet à l'École supérieure d'agriculture Luiz de Queiroz, explique que " nous pourrons utiliser les informations génétiques du nelore afin de sélectionner des animaux plus résistants aux parasites ou même développer des produits qui les rendront plus résistants ".

Les chercheurs brésiliens ont décidé de se concentrer sur environ 3 % des gènes bovins, justement ceux qui agissent sur la qualité de l'animal. " La recherche permettra, par exemple, de découvrir les gènes responsables du manque de tendreté et du goût de la viande, et d'utiliser ces informations en programme de sélection, explique M. Coutinho. La séquence de 6000 gènes bovins devrait également conduire vers une technique d'implantation embryonnaire plus efficace.

Pour l'éleveur et homme d'affaires Jovelino Mineiro, propriétaire de la Central Bela Vista Genética Bovina, les connaissances générées par le génome du bœuf ouvrent de grandes perspectives commerciales. Les tests génétiques pour identifier animaux supérieurs, nouveaux médicaments et vaccins ne sont que quelques-unes des applications dont il rêve." À moyen et long terme, nous allons produire les vaccins et les médicaments contre les maladies, notamment la fièvre aphteuse ", commente-t-il, optimiste. Mais il faut d'abord compléter la première étape : la séquence des 6000 gênes.

ASSOCIATION FRANCAISE POUR L’INFORMATION SCIENTIFIQUE (AFIS), 14 RUE DE L’ECOLE POLYTECHNIQUE, 75005 PARIS

Site internet : www.spsafis.org Coordinateur du comité départemental de Loire-Atlantique de l’AFIS : Michel NAUD, mn@ouestfonderie.com


OGM: le comité d’experts britanniques d’accord avec l’académie des sciences française  

(source Agence Science-Presse 28 juillet 2003) - Encore un rapport qui ne fera pas plaisir aux écologistes: les organismes génétiquement modifiés ne posent pas de risques apparents pour la santé humaine.

Mais comme s'il avait voulu ménager la chèvre et le chou, le rapport du comité d'experts britanniques s'empresse d'ajouter qu'il ne faut pas voir ses conclusions comme un appui à tous les OGM.

"La technologie des OGM n'est pas quelque chose d'homogène sur quoi les scientifiques peuvent donner des chèques en blanc", résume Sir David King, directeur de ce comité de 25 personnes, mandaté par le gouvernement.

"Les applications de cette technologie devront être considérées au cas par cas."

Au terme de son analyse, le comité n'a trouvé aucun cas lui permettant d'écarter les OGM en raison de risques sur la santé humaine.

Mais la science des OGM est encore trop jeune, poursuit le rapport, pour conclure de façon définitive.

Il faudra donc d'autres recherches...

 

OGM: la fin d'un embargo

(source Agence Science-Presse) - l'Europe va (ré)ouvrir son marché aux aliments génétiquement modifiés. Mais il reste à voir si le consommateur, échaudé par sept années de campagnes anti-OGM, va s'empresser d'en acheter.

Le Parlement européen a donné le 3 juillet son accord de principe à la levée de l'embargo –qui interdisait l'entrée de tout nouveau produit génétiquement modifié, mais n'interdisait pas, en Europe, la vente de produits qui s'y trouvaient déjà avant 1999. Le tout pourrait devenir loi cet automne.

Tout OGM devra toutefois être clairement étiqueté comme tel.

Les écologistes sont quant à eux insatisfaits, à la fois par la levée de l'embargo, et par la notion d'étiquetage, qui ne s'appliquera qu'aux aliments contenant plus de 0,9% de contenu génétiquement modifié.

De sa prison, José Bové a lancé un appel « avec ou sans étiquettes, non aux OGM ! »

 

OGM: le pays de l'opposition veut ouvrir la porte

(source Agence Science-Presse) - Le pays qui fut le premier à se lancer dans une opposition virulente aux organismes génétiquement modifiés (OGM), la Grande-Bretagne, lance une série de six débats publics sur les OGM.

Voulez-vous des OGM dans votre assiette, telle est la question posée dans ces débats financés par le gouvernement, et qui consistent à mettre face à face des gens "ordinaires" et des experts. Une formule inspirée des "conférences du consensus" tenues dans d'autres pays d'Europe ces dernières années.

A ceci près qu'ici, les gens "ordinaires" n'ont pas été choisis par sondage, et ne passeront pas une fin de semaine enfermés quelque part à potasser de la documentation sur les OGM. L'objectif officiel est le même: fournir des arguments au gouvernement pour décider si oui ou non, il autorisera que soient plantés de nouvelles cultures génétiquement modifiées sur son sol. A l'instar du reste de l'Union européenne, Londres maintient un tel moratoire depuis 1998.

A en juger par les deux premiers débats publics, dont l'un tenu dans la ville industrielle de Birmingham, ses arguments "pro-OGM" auront du mal à convaincre ceux qui sont déjà convaincus qu'il s'agit d'une menace...

 

la petite dernière sur les cellules-souches

(source Agence Science-Presse le 8 juillet 2003) - Des cellules provenant d'embryons humains ont permis à des rats paralysés de marcher à nouveau.

En franchissant ainsi la barrière des espèces, les chercheurs américains qui se sont livrés à cette expérience espèrent pouvoir commencer des tests similaires sur des humains dans seulement deux ans, le rêve étant de voir ces cellules-souches reconstruire une partie de la moelle épinière brisée, suffisamment pour qu'un quadraplégique puisse quitter sa chaise roulante.

Une cellule-souche est une cellule d'embryon qui ne s'est pas encore spécialisée et qui, en théorie, peut donc devenir n'importe quoi –en l'occurrence, ont supposé les chercheurs, injectez-en dans une moelle épinière et elle contribuera à reconstruire les fibres nerveuses de cette moelle épinière. Ou plus exactement, ces cellules aideront à construire de nouvelles fibres nerveuses.

C'est ce qui s'est produit chez ces rats après neuf semaines.

Les chercheurs de l'Université de Californie à Irvine admettent d'emblée que de traiter des humains paralysés s'avérera plus difficile que de traiter des rats …

 

et une petite histoire suisse pour la route …

(source CEA) Deux initiatives populaires, l'une visant une sortie progressive du nucléaire et l'autre un prolongement du moratoire adopté en 1990 sur la construction de toute nouvelle centrale, ont été rejetées à 66,3% et 58,4% par les citoyens suisses au cours du référendum du 18 mai dernier.

Actuellement, cinq centrales nucléaires produisent 37,7% de l'électricité dans le pays.


 souvenirs, souvenirs, … 1957, Ernest KAHANE, biologiste moléculaire

aliments naturels et artificiels

 

Existe-t-il des aliments « naturels » ? Y a-t-il une façon « naturelle » de se nourrir ? Le « naturel » est-il un gage de supériorité en matière alimentaire ? Ces questions sont posées – de façon généralement implicite – par certaines propagandes et publicités, et la réponse qui leur est donnée influence les habitudes alimentaires d’une partie du public. Nous nous demanderons si c’est à juste titre, et s’il ne s’agit pas des effets d’une phobie irraisonnée ou mal informée. Il ne s’agit pas d’épuiser le sujet, qui est des plus vastes, nous prendrons comme exemples le pain et le vin, à propos desquels on oppose plus souvent encore qu’ailleurs, les produits considérés soit comme naturels soit comme artificiels.

 

le pain

 

Prenez parmi d’autres une herbe de la prairie, dont les graines, quoique rares et misérables, semblent propres à nous alimenter. Soignez-la avec tout l’amour du jardinier attentif, vous en ferez, les générations aidant, la plante blé, aux lourds épis gorgés d’amidon et de gluten, dont les qualités ne persisteront qu’au prix d’une culture savante et de soins incessants, comportant notamment le contrôle de la semence et la restauration d’un sol épuisé par la végétation forcée.

 

Récoltez les épis, battez les, séparez le grain de la balle, laissez le reposer, broyez le, écartez le son indigeste et irritant, laissez encore reposer la farine. Telle quelle, celle-ci n’est guère appétissante et nutritive. Malaxez la longuement avec de l’eau salée pour en faire une pâte lisse, cette pâte ne sera pas encore un bon aliment.

 

Si vous inventez de la cuire au four, nouveauté dans l’histoire du monde, vous aurez des galettes compactes, modérément appétissantes et digestibles. Servi par le hasard et les tâtonnements, vous découvrirez un jour que cette pâte, si elle est faite de façon malpropre, gonfle au repos, et fournit à la cuisson une matière légère, de saveur agréable, que vous nommerez pain, et vous vous habituerez à favoriser cette transformation en ajoutant à votre pâte de chaque jour un peu de pâte de la veille, que vous appellerez levain. Après des millénaires de routine et des siècles d’efforts réfléchis, un certain Pasteur vous apprendra que vous provoquez ainsi l’ensemencement par une moisissure, et vous montrera comment agir à coup sûr.

 

Qu’est-ce qui est naturel dans cette longue histoire où nous voyons se déployer au long des générations tout l’industrieux génie humain ? A quelle étape devrions-nous nous arrêter pour que la fabrication soit à considérer comme naturelle en-deça, comme artificielle au-delà ?

 

le vin

 

La soif n’est pas moins impérieuse que la faim, et ne se contente pas toujours de l’eau des fontaines. Au besoin d’eau, qui est commun à tous les êtres vivants, l’homme ajoute le besoin d’excitants et de stimulants. Nous ne savons pas encore à quoi répond ce besoin, qui n’est pas spontané, qui est certainement acquis, mais nous pouvons affirmer qu’il n’est pas le seul effet de l’habitude, en constatant qu’il est universel, qu’il est commun à tous les groupes ethniques, quel que soit leur degré d’évolution.

 

Il est satisfait par une industrie plus étrange encore que la précédente. Parmi les innombrables variétés de putréfactions que nous observons, il en est qui attaquent les fruits avec un bouillonnement à la suite duquel leur jus, ayant perdu sa saveur sucrée, a gagné une vertu capiteuse à laquelle nous trouvons de l’agrément. Plus le fruit est sucré, plus est puissant l’effet du jus qu’il donne par cette « fermentation ».

 

Nous avons savamment éduqué la plante nommée vigne de façon qu’elle fournisse en abondance des grappes de fruits particulièrement riches en sucre, nous avons appris à connaître les lieux où sa culture est la plus efficace, et les soins assidus grâce auxquels elle fournit le résultat jugé le plus satisfaisant par un palais devenu lui-même de plus en plus exigeant. Nous avons discipliné la fermentation, en opérant de préférence sur le liquide qui s’écoule du fruit écrasé. Nous avons inventé un grand nombre de précautions, et nous les observons pour la durée de chacune des opérations successives, pour la température à laquelle elles se déroulent, pour le repos à l’obscurité auquel nous soumettons le produit obtenu, et même pour le choix des récipients de fabrication puis de conservation.

 

Nous avons lutté de notre mieux contre les putréfactions parasites qui entrent en concurrence avec celle que nous voulons favoriser, nous avons beaucoup tâtonné, et n’avons pas toujours été heureux dans les moyens employés. C’est que nous agissions à l’aveuglette, arrosant les vignes de cuivre ou soufrant les futailles, sans bien savoir ce que nous faisions et pourquoi nous le faisions. Le même Pasteur a commencé à nous guider, et il nous a singulièrement surpris en nous apprenant que c’est la même moisissure qui provoque la fermentation de la pâte à pain et celle du moût de raisin.

 

Je poserai au sujet du vin la même question qu’au sujet du pain. En quoi le vin, effet de l’industrie humaine, serait-il un produit naturel ? Et en vertu de quoi l’emploi de tel artifice serait-il conforme à la « nature », et celui de tel autre étranger à la « nature » ?

Imprimerie spéciale, Saint Aignan de Grand lieu