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sujet : développement durable
document :
l’astrologie au crible de la science (James LOVELOCK)
l’astrologie au crible de la science
Christian NITSCHELM, astrophysicien ( RUCA, IAP )
Ce
texte est extrait d’un article © du site personnel de James LOVELOCK, docteur
Les bases astronomiques
Les notions
astronomiques de base sont assez généralement très mal assimilées par les astrologues,
quelle que soit l'école d'appartenance. La notion de constellation, simple
apparence subjective sans aucune réalité physique, est très mal comprise par
les astrologues. Ils associent en effet aux constellations des propriétés
étranges et irréelles liées à leurs noms. Les formes de ces constellations, aux
noms généralement issus de la mythologie gréco-romaine et qui ont
significativement variées depuis l'Antiquité, n'ont étéfixées
qu'en 1930, de même que leur nombre.
La notion de signe
zodiacal, qui n'a plus aucun sens en astronomie moderne, est encore plus mal
employée par les astrologues, par simple ignorance des mouvements apparents des
astres et de certains mouvements particuliers de l'axe de rotation terrestre.
La trajectoire apparente du Soleil en un an autour de la Terre définit sur la
sphère céleste un grand cercle appelé écliptique. L'écliptique coupe ainsi
quatorze constellations, de tailles très inégales, sur la sphère céleste avec
leurs limites de 1930, en l'occurrence les Poissons, la Baleine (qui est
simplement longée par l'écliptique), le Bélier, le Taureau, les Gémeaux, le
Cancer, le Lion, la Vierge, la Balance, le Scorpion, Ophiucus,
le Sagittaire, le Capricorne et le Verseau. Curieusement, les astrologues ne
retiennent que douze d'entre elles pour en faire les douze signes, tous de
taille égale à 30°, de l'astrologie européenne.
Le nombre de signes
zodiacaux a d'ailleurs significativement varié d'une civilisation à l'autre
depuis l'Antiquité. En effet, il est passé de 6 en Mésopotamie primitive à 28
en Chine médiévale, en passant par 11 à Babylone et 20 chez les toltèques.
Cette simple constatation enlève toute signification logique et précise aux
douze signes utilisés actuellement. Pourquoi pas, en effet, un, dix, cent,
trois cent soixante-cinq ou dix mille signes zodiacaux? Pourquoi un nombre
entier de signes? En effet, les constantes utilisées en mathématiques, en
physique, en chimie et en astrophysique sont le plus souvent réelles,
c'est-à-dire non-entières. Pourquoi les constantes
astrologiques seraient-elles alors presque toujours entières?
A cause de l'un des
mouvements de l'axe de rotation terrestre, appelé précession des équinoxes, les
signes zodiacaux glissent lentement le long du cercle écliptique dans le sens
rétrograde par rapport aux constellations du zodiaque, bouclant une rotation en
25750 années. Ce lent mouvement fait que les signes zodiacaux ne correspondent
plus depuis longtemps à leurs constellations associées. Par exemple, le Soleil
ne se trouve pas devant la constellation du Bélier vers la fin mars, mais
devant celle des Poissons, non loin de la limite avec celle du Verseau, proche
de l'endroit où est localisé actuellement le Point Vernal, direction du Soleil
au moment de l'équinoxe de printemps pour l'hémisphère nord. A cette époque
cependant, il est supposé se trouver, selon n'importe quel astrologue, dans le
signe du Bélier. Face à ce problème, certains astrologues pratiquent une
astrologie, dite sidérale, qui s'oppose à l'astrologie classique, dite
tropique, et qui considère les constellations du zodiaque et non plus les
signes astrologiques. Cette nouvelle sorte d'astrologie peut immédiatement être
classée comme caduque, les saisons ne correspondant plus à la position du
Soleil...
Par une utilisation
curieuse du phénomène de précession des équinoxes, certains astrologues
affirment bizarrement l'existence d'ères d'influences astrales. Ainsi nous
serions selon eux vers la fin de l'ère des Poissons, non loin du commencement
de l'ère du Verseau. Ces ères correspondraient en fait à la période de
traversée de la constellation associée par le Point Vernal, du fait du
mouvement de précession des équinoxes. Chaque astrologue propose sa propre
date, à chaque fois différente, pour le début de cette soi-disant ère du Verseau
qui débuterait toujours dans un futur proche. Cependant, en prenant les limites
officielles de 1930 pour les constellations zodiacales, on arrive par un calcul
simple à des dates bien différentes, le début de la soi-disant ère des Poissons
se situant vers 70 avant J.C., et sa fin en l'an 2614
de notre ère, invalidant totalement le discours astrologique. La soi-disant ère
du Verseau, qui n'a rigoureusement aucun sens en astronomie, n'existe en fait
que dans l'imagination trop fertile, voire délirante, de ces astrologues qui
semblent confondre leurs fantasmes avec la réalité, les constellations n'étant
que des projections fictives de certains mythes bien terrestres sur la voûte
céleste des anciens grecs.
La position d'un astre
sur la sphère céleste ne peut être parfaitement connue qu'à l'aide d'un système
de trois coordonnées: la longitude céleste rapportée à une origine, la latitude
céleste et la distance. La non connaissance de l'une de ces trois coordonnées
induit une énorme imprécision sur la position de l'astre. Les coordonnées
écliptiques constituent l'un des principaux systèmes de coordonnées célestes
utilisés en astronomie. Les astrologues utilisent très mal ce système, la
longitude écliptique étant seule prise en compte par ceux-ci de manière très imprécise.
La connaissance de la position précise d'un astre est incompatible avec le
système astrologique de repérage.
L'astrologie est
curieusement fille des régions tempérées de l'hémisphère nord. En effet, elle
n'est adaptée que dans ces régions, ne serait-ce qu'à cause du phénomène des
saisons. Dans les régions tempérées de l'hémisphère sud, les saisons sont
inversées, ce qui enlève toute vraisemblance au symbolisme associé. Ainsi, le
signe du Lion, qui correspond à l'été boréal, est supposé avoir des propriétés
d'exhalation de la chaleur, ce qui ne marche évidemment pas dans l'autre
hémisphère, alors en plein hiver austral. En zone tropicale, la situation est
encore pire d'un point de vue astrologique, les saisons n'étant qu'au nombre de
deux, la saison sèche et la saison humide (sujettes à des variations
régionales), et sans variation de température!
Dans les régions
polaires, la plupart des systèmes astrologiques en vigueur ne permettent même
pas de construire des horoscopes viables. Certains astres et certains signes
n'y sont en effet jamais visibles, alors que les "maisons"
astrologiques, absolument indispensables pour l'élaboration de l'horoscope, ne
peuvent même plus y être calculées et ne coupent plus, de toute façon,
l'écliptique, dans la plupart des cas.
Quelle est, à ce
propos, la signification physique des "maisons" astrologiques et
pourquoi celles-ci ne peuvent-elles exister dans certains cas sur et au-delà
des cercles polaires? En effet, ces "maisons" astrologiques, où que
l'on se trouve dans l'Univers, ne correspondent strictement à rien!!! D'un
autre point de vue, si l'astrologie était une science, on peut légitimement se
demander quel serait l'horoscope d'un individu né ailleurs que sur Terre, les
lois de la physique étant les mêmes partout dans l'Univers.
Quelle serait, alors,
l'influence de la Terre?
Les lois de la physique
L'astrologie présuppose
implicitement l'existence d'un certain nombre d'influences astrales dues au Soleil,
à la Lune et à quelques autres objets, en l'occurrence les grosses planètes. Si
influences astrales il y a, alors il s'agit tout d'abord d'élaborer des lois
cohérentes donnant leurs natures, leurs portées, leurs modes d'action, ainsi
que leurs facteurs de dépendance, distance, masse, etc.
Ces soi-disant
influences sont-elles des forces? Si oui, de quel type? Il n'est actuellement
connu que quatre types de forces fondamentales: l'interaction forte,
l'interaction faible, la force électromagnétique et la force de gravitation.
Dans quel type de force fondamentale est-il possible de classer ces influences
astrales? Est-ce une nouvelle force fondamentale? Il faudrait alors la
définir!!! D'un autre point de vue, si ces influences ne sont pas des forces, sont-elles
alors des énergies? Si oui, la même question se pose, une énergie étant
parfaitement quantifiable! On connaît en effet de nombreuses formes d'énergie:
cinétique, potentielle, élastique, radiative, chimique, nucléaire, interne, etc... Quelle peut bien être la forme d'énergie qui
pourrait correspondre aux soi-disant influences astrales invoquées par
l'astrologie?
Quelle est alors la
nature des influences astrales présupposées par l'astrologie et qui agiraient
sur les individus à l'instant de leur naissance (pourquoi pas l'instant de leur
conception (serait-ce une indiscrétion?) ou n'importe quel autre instant?)?
Comment ces influences agiraient-elles sur les humains (pourquoi seulement sur
les humains?) ou sur certains individus (à Babylone, seul le prince, lui-même
demi-dieu, était jugé digne d'être en relation avec les "astres-dieux"). Quelles sont les lois physiques qui
régissent ces soi-disant influences astrales et comment évoluent-elles en
fonction des distances, des masses ou autres paramètres? Pourquoi les corps
proches (personnes, immeubles, voitures, arbres, etc.) n'agiraient pas autant,
voire plus, que les planètes ou même que certaines étoiles brillantes, pour
raison de proximité (cas des forces gravitationnelles et des forces de marées)?
Pourquoi, à l'inverse, les corps très éloignés (étoiles, galaxies, amas de
galaxies...) n'agiraient pas de même, ne serait-ce que par leur grand nombre
(cas d'une force indépendante de la distance, présupposée par le flou
artistique astrologique et dont on attend toujours une définition cohérente)?
Et que dire des autres corps présents dans le Système Solaire (astéroïdes,
comètes, satellites naturels et artificiels, poussières interplanétaires,
rayonnement, etc.).
Il faudrait donc
expliquer clairement pourquoi ces influences astrales n'existeraient que pour
le Soleil, la Lune et quelques planètes, alors que l'immense majorité des corps
célestes n'agirait aucunement sur les humains. De même, il faudrait préciser si
ses soi-disant influences agissent seulement sur les humains (et alors,
pourquoi?) ou sur les animaux et les plantes (et alors, comment?).
Il n'a jamais été donné
de réponse claire à ce problème. Les soi-disant influences astrales, qui ne
sont ni des forces, ni des énergies, n'ont en effet jamais été confirmées par
une quelconque expérience scientifique digne de ce nom...
Les études statistiques
Les études statistiques
menées de manière objective et honnête ont toujours montré que l'astrologie ne
marchait que par simple hasard et que les signes ou les planètes n'avaient pas
d'influence particulière sur la destinée d'un individu quelconque. En
particulier, une étude statistique a été très sérieusement effectuée en 1985
aux Etats Unis (en Californie) avec l'accord d'une quarantaine d'astrologues. Cette
étude, qui utilisait une série de tests en double aveugle, a clairement
démontré de manière objective que les prédictions des astrologues ne marchent,
au mieux, que par le simple hasard ou sont, au pire, totalement erronées: la
corrélation affirmée et/ou prédite entre la position des planètes et autres
objets astronomiques à l'heure de la naissance et la personnalité d'un individu
quelconque n'existe pas. L'expérience scientifique réfute clairement
l'hypothèse astrologique.
Cependant, certaines
statistiques, trop éloignées de la stricte impartialité, voire sciemment
biaisées, ont parfois pu montrer le contraire. Après analyse, il a toujours été
mis en évidence que ces dernières statistiques avaient été arrangées, voire
trafiquées, afin de pouvoir atteindre un tel résultat. On est bien loin ici de
l'honnêteté et de l'objectivité d'une quelconque démarche scientifique menée
correctement...
Ethique
De quel droit les
astrologues essayent-ils de régenter la vie des autres humains? Si l'astrologie
se contentait seulement de définir un quelconque profil psychologique, elle
entrerait déjà en conflit avec la psychologie scientifique mais ne serait pas
dangereuse. Cependant, l'évolution actuelle d'une certaine astrologie vers un
dirigisme plus ou moins complet de la vie de chacun est totalement inadmissible
et intolérable, voire dangereux, nombre d'astrologues se substituant, de
manière absolument illégale, aux psychologues, aux médecins, voire aux
thérapeutes.
Certaines pratiques
astrologiques, bien trop médiatisées, violent ainsi les bases mêmes de
l'éthique. Accepteriez-vous que quelqu'un d'inconnu prétende vous connaître
totalement et s'autorise à diriger votre vie de manière arbitraire, en bien ou
en mal? Le déterminisme astrologique, partiel ou absolu, s'oppose ici
clairement au libre arbitre, droit inaliénable de chaque être humain ayant vécu
ou vivant sur notre planète. Même si, selon la plupart des astrologues,
"les astres inclinent, mais ne déterminent pas", l'astrologie est de
manière doctrinale beaucoup trop déterministe, allant jusqu'à amputer le libre
arbitre de chaque être humain. Cette constatation a d'ailleurs conduit
différentes églises, en particulier l'Eglise Catholique, à rejeter toute
crédibilité à n'importe quelle sorte d'astrologie, le déterminisme, même
astrologique, étant contraire à la notion religieuse de libre choix pour le
salut de chaque individu.
L'utilisation de
l'astrologie pour le recrutement dans certaines entreprises, d'ailleurs
actuellement hors-la-loi, viole les principes fondamentaux des droits de
l'homme. Ceci rappelle en effet par trop fâcheusement certaines pratiques
honteuses appliquées durant l'occupation, période la plus sombre de notre
histoire. L'astrologie est également bien trop souvent utilisée par certaines
sectes dont le but principal est l'asservissement total de l'être humain et de
son esprit à un gourou omnipotent.
Conclusion
L'astrologie,
construite depuis son origine sur des bases totalement irrationnelles, se classe
donc indubitablement parmi les fausses sciences et ne peut en aucun cas être
classée parmi les sciences. Elle reste en effet totalement irrecevable dans une
vision scientifique de l'Univers pour un grand nombre de raisons, divergences
criantes entre astrologues, nature hasardeuse et souvent invérifiable des
prédictions astrologiques, nature floue des soi-disant influences astrales, etc...
Depuis l'Antiquité, la
vision astrologique du monde est toujours restée figée, voire engluée, dans un
géocentrisme purement aristotélicien, en totale contradiction avec la vision
moderne de l'Univers. Cette simple constatation enlève toute validité
scientifique et toute crédibilité à un édifice basé sur une vision cosmologique
antique et médiévale complètement dépassée, qui plaçait la Terre au centre d'un
univers fini de petite taille, ainsi que sur une soi-disant position
privilégiée de l'Homme dans le cosmos. En effet, le Soleil, pas plus que la
Terre, n'occupe aucunement le centre de l'Univers. Il appartient à notre Voie
Lactée, gigantesque système stellaire de plus de cent milliards d'étoiles, dont
il n'occupe aucunement le centre. La Galaxie n'est que l'une des milliards de
galaxies et n'est certes pas située au centre de l'Univers. On ne peut même
plus parler actuellement d'un quelconque centre pour notre Univers!
En 1666, Colbert, alors
ministre d'état du roi Louis XIV, fit exclure de l'Université de Paris
l'enseignement de l'astrologie. Celle-ci perdit alors tout accès potentiel au
statut de science, statut qu'il était encore possible de lui attribuer par
erreur avant cette date, malgré les très nombreuses prédictions fausses et
jamais réalisées que nombre d'astrologues, parmi les plus célèbres, avaient
auparavant affirmé comme vérités d'évangile, depuis l'Antiquité jusqu'à la
Renaissance...
La part de rêve induite
par l'astronomie est extraordinaire. Qui ne s'interroge pas en effet sur la
signification profonde du Monde lorsqu'il lève les yeux vers les merveilles
célestes? Cette question est absolument légitime mais ne doit pas masquer le
fait que les réponses restent très complexes, essentiellement du domaine de la
science et de la philosophie. L'astrologie donne une réponse, certes agréable,
mais par trop simpliste qui ne devrait en aucun cas satisfaire l'honnête homme.
L'astronomie ne suffit-elle pas à dévoiler les mystères de notre Univers et ne
montre-t-elle pas implicitement la vanité de toute explication astrologique et
divinatoire du Monde?
Tant que l'astrologie
se cantonne au niveau du mythe, son existence ou sa non-existence n'interfère
en aucun cas avec le champ des sciences. Les scientifiques ne se sentent alors
absolument pas concerné par ce qui apparaît en fait comme une résurgence de la
religion gréco-romaine à travers plus de dix-sept siècles de christianisme.
Cependant, toute aspiration de l'astrologie à la scientificité reste et restera
inadmissible pour l'ensemble de la communauté scientifique tant que les grandes
questions fondamentales resteront sans réponses!
Pourquoi, alors,
certains astrologues cherchent-ils de manière aberrante, à faire passer leurs
affirmations pour des faits scientifiques? Les fondements de l'astrologie ne
sont-ils pas suffisamment solides pour pouvoir répondre à l'évolution des
connaissances? N'est-ce pas ici la recherche d'une caution scientifique abusive
pour une pratique très éloignée de toute science, trop souvent proche de
l'imposture, dans un but peu avouable, au mieux bassement mercantile?
L'astrologie, quelle que soit l'école d'appartenance, ne peut en aucun cas
prétendre être une science.
Dijon, France,
printemps 1994 (dernière remise à jour: avril 1999)
Christian Nitschelm & Raslan Leguet
afis, Science et pseudo-sciences, 14 rue de l'école polytechnique, 75005 PARIS.