les dossiers de l’ afis44
DOSSIER : GENETIQUE
sujet
: le clonage humain
rubrique : informations générales
document : note introductive au sujet « clonage
humain »
En décembre 1984, lorsque le spécialiste
le plus reconnu en matière de recherche sur le clonage (Davor
SOLTER dans la revue Science) annonçait que « le clonage de
mammifères par simple transfert de noyau est biologiquement impossible »,
cela jetait un froid dans la petit communauté des laboratoires de recherches en
génétique et la plupart des recherches étaient réorientées : les firmes
qui espéraient des résultats (à visée de thérapeutique humaine ou de maîtrise
de la reproduction des animaux d’élevage) coupaient les crédits à des recherches
qui se profilaient non rentables, et les chercheurs quittaient des filières
dans lesquelles publications et reconnaissance professionnelle ne semblaient
plus à attendre.
Une poignée
d’irréductibles écossais conduits par Ian WILMUT et Keith
CAMPBELL continuèrent néanmoins leurs recherches dans la
quasi ignorance générale jusqu’à ce qu’au détour de l’évaluation d’une
publication pour Nature en mars 1996 Davor SOLTER soit lui-même amené à reconsidérer sa position et à
reconnaître que « le clonage de mammifères à partir de cellules
adultes sera beaucoup plus difficile mais ne peut plus être considéré comme
impossible ». Le 5 juillet 1996 leur laboratoire, le ROSLIN INSTITUTE
associé avec PPL THERAPEUTICS, voyait la naissance de la première brebis
clonée, DOLLY, naissance annoncée dans Nature en février 1997.
Les programmes de
recherches retrouvaient leur financement et reprenaient de plus belle ;
chacun prenait conscience que désormais le compte à rebours était
lancé ; la possibilité technique du clonage reproductif d’un être
humain entrait raisonnablement dans le domaine du possible ; d’aucuns se
préparaient déjà à sa mise en oeuvre.
Dès 1997, le mouvement Raëlien, d’origine française et connu pour son histoire
fantasmagorique d’une humanité née il y a 25 000 ans du contact d’une
civilisation extraterrestre avec notre planète,
créait la société CLONAID, dirigée par la biochimiste française Brigitte
BOISSELIER, « évêque raëlienne », dans
l’objectif annoncé de réussir le clonage humain reproductif afin de donner à
l’humanité, par la technique du clonage, la voie de la vie éternelle … Dans les
mêmes temps plusieurs laboratoires de procréation assistée empruntaient eux
aussi les mêmes voies en vue de répondre, quant à eux, à des demandes de
procréation par des candidats à la parenté.
Les réactions ne se
faisaient pas attendre ; les religions, au nom du caractère sacré de la
vie, engageaient leur lobbying en vue de mettre un terme à toute recherche sur
le clonage; leurs arguments se voyaient confortés par ceux qui s’inquiétaient
de la possibilité ainsi donnée de renouer avec des fantasmes de construction
d’une race d’hommes nouveaux (en faisant référence au nazisme). Pour ces
sensibilités, la recherche sur le clonage devenait un « crime contre la
personne humaine » si ce n’est un « crime contre l’humanité ».
S’inquiétant à la fois
des dérives possibles et de la menace que faisaient peser sur la recherche
scientifiques les prétentions religieuses, à l’initiative du philosophe Paul
KURTZ, 31 personnalités internationales,
lauréates de l’académie internationale d’humanisme (dont en France
l’académicien des sciences Jean-Claude PECKER, ancien président de notre
association, et Madame Simone VEIL, ancienne présidente du parlement européen)
en appelaient dès 1997 d’une part à l’établissement de directives en prévention
des abus et d’autre part à un rassemblement le plus large pour la liberté et
l’intégrité de la recherche scientifique, en particulier en matière de clonage.
En 2003, les débats
d’ordre éthique se poursuivent alors qu’il n’est plus guère de mois où le
clonage d’un nouvel animal n’est annoncé (cet été ce fut le tour successivement
du mulet – dont c’est ainsi la seule voie de reproduction puisque cet animal
est stérile - puis du cheval). Les annonces de naissances de clones humains se
succèdent elles aussi : depuis l’annonce de la naissance de la petite Eve le 26 décembre
2002 la société raëlienne CLONAID revendique désormais cinq naissances alors
que le professeur PANAYOTIS ZAVOS, spécialiste en procréation assistée, vient
d’annoncer la naissance de son premier petit clone en avril 2003. En réalité
aucune de ces naissances de clones humains n’est à ce jour avérée mais
chacun sait qu’un jour ou l’autre cela va finir par être vrai.
La question du clonage
et des améliorations génétiques ne s’arrête évidemment pas aux côtés les plus
médiatiques du clonage reproductif animal (par exemple pour retrouver l’animal
perdu comme la chatte MISSY) ou humain, et s’interface avec l’actualité des
clones génétiquement modifiés (comme la brebis POLLY du laboratoire PPL
THERAPEUTICS, qui contient dans son lait le facteur de coagulation sanguin
humain FIX dont l’absence entraîne l’hémophilie de type B) ou celle des
xénogreffes et bien d’autres encore qui accompagnent le développement de la
génétique depuis la découverte de l’ADN en 1953.
C’est à un voyage dans
l’univers de la génétique moderne, que ce dossier vous invite. Ce regroupement ne prétend pas à
l’exhaustivité ni de toutes les questions soulevées ni de toutes les prises de
position. il s’agit d’un échantillonnage qui se veut
honnête. La conférence que nous avons co-organisée le 8 septembre 2003 avec nos
amis de l’union rationaliste et de la libre pensée au muséum d’historie
naturelle de Nantes, en invitant le biologiste moléculaire Bertrand Jordan,
membre des comités scientifique et de parrainage de notre association,
s’inscrivait dans cette même démarche. Faîtes un libre examen du sujet,
utilisez votre raison critique et forgez-vous votre propre opinion.
Michel NAUD, coordinateur
du comité départemental de Loire atlantique de l’association française pour
l’information scientifique
afis, Science et pseudo-sciences, 14 rue de l'école polytechnique, 75005
PARIS.